Hors récit par Fifiverte

Campagne commencée le mardi 10 mars 2015 et terminée le vendredi 24 avril 2015

Rounds Mots Signes Temps
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Round 1/42 écrit le mardi 10 mars 2015

287 mots | 1656 signes

Je suis seul à présent dans la maison des Espêches. Ce matin j'ai déposé Agnès et sa fille à la gare de Valence. Nous avons passé deux nuits ensemble et maintenant je sens son ombre qui sautille et me frôle lorsque je passe d'une pièce à l'autre. J'entend sa voix, son drôle de rire. Mon coeur se fige. Même les mouches doivent se souvenir de son rire. Je n'ai pas trouvé un seul lit confortable ici. Tous les matelas sont durs, plats, posés à même le sol ou sur des palettes de récupération. Comment vais-je pouvoir dormir ? Demain j'irai dans un grand magasin d'ameublement et j'achèterai un sommier digne de ce nom. Oui ça sera mon cadeau pour elle. Je vais faire livrer un lit confortable dans sa chambre. Ha je vois sa tête d'ici. Mais non Ethan il ne fallait pas, tu es fou, ça a du coûter cher. Mais j'ai assez d'argent pour cela. Plutôt que lui offrir une bague je lui offrirai un espace moelleux pour se reposer, une zone de plaisir. Chez "literie de rêve", les vendeurs étaient aux petits soins. J'ai essayé plusieurs sommiers et trouvé un matelas à mémoire de forme, comme ça elle ne m'oubliera pas, j'ai pensé. Ils vont le livrer dans quelques jours. En attendant, j'ai empilé trois matelas dans la chambre. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire jusqu'à fin juillet ? Est-ce que je vais l'attendre ou rentrer plus tôt ? J'envoie des messages mais elle ne me réponds pas, bien trop occupée à découvrir l'immensité des autoroutes. J'ai peur pour ma voiture. Je suis tourneboulé de partout avec un gros manque à l'intérieur. Je ne pensais pas pouvoir être aussi chamboulé à 53 ans.

Round 2/42 écrit le mercredi 11 mars 2015

432 mots | 2437 signes

Troisième jour. Nuit éprouvante. Un chat a miaulé dehors et m'a réveillé. Agnès m'a appelé pour me dire qu'elle n'arrivait pas à démarrer ma voiture. ça promet. Je l'imagine sur la route entre Boston et Lakeview dans mon gros 4x4. Tant pis pour le 4x4. Sale américain pollueur, voila ce que je suis. un sale américain pollueur de la planète. Hum. Agnès me manque encore. Je voudrais l'abriter, m'abriter en elle. Me dissoudre, me fondre, fonder aussi quelque chose de neuf. Neuf. Hier c'était la fête de l'indépendance alors j'ai sorti une bouteille de Clairette et me suis mis à la boire tout seul dans le patio. J'ai suspendu une guirlande que j'avais découpé dans du papier journal et puis j'ai mis la télé. Sur une chaîne pour les enfants j'ai regardé les Simpsons. Huch notre culture pourrie a envahie l'Europe. 4 juillet. Je me souviens de la fête de l'indépendance quand j'étais petit chez mes parents. Les gens se trimballaient sur des chariots décorés. On faisait griller des saucisses. Une fois mes parents nous ont emmené faire du camping au bord du lac Michigan. Il y avait des feux d'artifice partout. Est-ce qu'Agnès et Justine vont aller voir le feu d'artifice de Williamstown comme je leur ai conseillé ou bien ne sont-elles pas encore remises du décalage horaire ? Je me demande ce qu'Agnès pense de la maison. C'est assez impersonnel après tout puisque Patricia a pris en charge la décoration. Si elle savait... Il faut que je me pose la question de ce que je veux faire ici. Le matelas doit arriver cet après-midi. Il y a des piles de livres le long des murs de la chambre. Je me demande si Agnès les a tous lu. Agnès ? On a pas eu le temps de tout se dire. Je lui envoie un sms pour lui demander des conseils de lecture. Sur la table de nuit il y a un bouquin dont le titre est : "la vie commence à 50 ans". Sinon je pourrais commencer par de la poésie. Les abricots que nous avons acheté ensemble au marché commencent déjà à s'abimer, certains étaient trop murs. Trop murs comme moi avec mes bourrelets. Pourquoi me suis-je constitué une énorme carapace ? Que voulais-je masquer ? Qui voulais-je protéger ? ça fond un peu. J'ai dit à Angès - je vais l'appeler anges - que lorsqu'on se reverrait j'aurais encore perdu du poids. ça me motive parce que je ne veux pas l'écraser. Je veux pouvoir me tenir au dessus d'elle sans me prendre des crampes dans les bras.

Round 3/42 écrit le jeudi 12 mars 2015

470 mots | 2661 signes

Le jour de la livraison Les livreurs ont frappé à la porte côté rue. Je n'ai rien entendu parce que je faisais une sieste dans le patio. C'est la voisine d'en face qui leur a dit que la porte n'était pas fermée à clé, ils n'avaient qu'à monter. Je rêvais, les yeux clos dans le fauteuil relax tout confort lorsque les deux gars on débarqués. - Hum, hum, dit l'un se raclant la gorge - c'est pour la livraison. J'ai fait un bond de dix centimètres et le transat s'est effondré par terre. -Chuis désolé M'sieur, désolé. J'étais par terre et n'arrivais pas à me lever. L'avantage c'est qu'avec ma couche de gras, le coccyx ne devait pas avoir morflé. Un des gars m'a tendu la main et j'ai réussi à m'extraire du fauteuil qui s'était replié sous mes fesses et m'avait pris en sandwich. - Vous pouviez pas sonner ? j'ai dit. - Y avait pas de sonnette. On est descendu dans la rue tous les trois et avisé pour savoir comment monter les deux cartons à l'étage avec l'escalier étroit. J'étais con de ne pas avoir pensé à ça avant. A la maison c'est Patricia qui s'occupe de l'intendance. Il y avait encore du bazar dans le corridor. Agnès n'avais pas eu le temps d'apporter les cartons d'emballage à la déchetterie. J'ai dit aux gars que j'avais besoin d'un remontant après ma chute. - Je nous sers un pastis et on attaque après ? - C'est gentil mais on a pas que ça à faire. Alors j'ai sorti mon portefeuille. J'ai pioché quatre billets en prenant soin de ne pas prendre les dollars au lieu des euros, je leur en ai tendu deux chacun et j'ai dit. - Si ça peut compenser. Les deux gars ont souri et on s'est installé dans le patio. J'ai sorti le pastis, un bol de cacahuètes et des chips. - On dira qu'on a eu un problème sur la route. Après la collation, ils m'ont aidé à débarrasser le corridor puis on a déballé le matelas, on l'a plus ou moins roulé et tout est passé de justesse. Heureusement il n'y avait pas de coudes dans l'escalier. Arrivé sur le perron du premier un des gars a viré sur la droite pour passer le chargement par la porte et a percuté une vitre. La fenêtre qui donne sur le patio s'est brisée. -Putain Fred a dit l'autre, dodelinant de la tête. - Et merde. Il a levé les yeux au ciel - à mon tour d'être désolé. J'ai éclaté de rire soit à cause des effets du pastis soit à cause de sa tronche. Les deux gars n'ont pas paru comprendre puis l'autre a dit : - Vous inquiétez pas c'est l'assurance de Litrirève qui paiera. On a fini pas rentrer le lit dans la chambre d'Agnès et j'ai ressorti deux billets pour qu'ils dégagent l'ancienne literie.

Round 4/42 écrit le vendredi 13 mars 2015

245 mots | 1408 signes

J'ai bien dormi sur le nouveau matelas.

Agnès a appelé pour me demander des infos sur New York, elle cherchait un hébergement. J'ai pris ma voix la plus laconique et répondu que je ne connaissais personne dans cette ville. Je suis jaloux de ne pas être avec elle, voila la raison. Je ne vais quand même pas passer toutes mes vacances à remeubler cette maison. Si . Après le lit je vais refaire la cuisine ou monter des étagères pour ranger les livres qui s'empilent sur de vieilles planches soutenues par des briques.

Je suis descendu dans la remise pour voir s'il y avait du bois et des outils mais il y régnait un tel bazar que ça m'a dissuadé. Alors j'ai appelé Micheline. Je lui ai demandé si je pouvais bricoler un peu dans la maison parce que je m'ennuyais. Elle a paru ravie et m'a demandé si je pouvais lui changer l'ampoule de sa cave par la même occasion. Je prenais les mesures quand elle a débarqué. Elle m'a montré un placard tout au fond de la remise. - c'est là que mon mari bricolait. J'ai ouvert la porte et trouvé une visseuse datant des années 90, l'ai branché et miracle ça fonctionnait.

Micheline m'a confié que son mari n'aimait pas la maison des Espêches. C'était la maison de ses parents à elle et ils ont déménagé là après leur décès.

Le lendemain je suis retourné dans la zone commerciale de valence pour acheter des planches.

Round 5/42 écrit le samedi 14 mars 2015

293 mots | 1703 signes

J'ai eu du mal à trouver le rayon découpe du magasin de bricolage. Tous les vendeurs étaient occupés à je ne sais quoi. Personne ne semblait s'intéresser à moi. Alors je suis allé à l'accueil et j'ai demandé à parler au responsable.

  • C'est pas parce que je suis gros et que j'ai un accent que je doit poireauter plus que les autres j'ai dit.

Tout de suite l'hôtesse d'accueil s'est mise dans ses petits souliers. Je l'ai vu appuyer sur un bouton sous le comptoir. Puis elle a fait des signes à un type qui s'agitait derrière les vitres d'une mezzanine avec vue sur tout le magasin.

  • C'est le patron ? j'ai demandé.

Elle a hoché la tête et le type est descendu de sa cage de verre.

  • Monsieur ++ responsable de l'enseigne.

  • Vous savez Monsieur ++, dans mon pays on considère mieux les clients . Ici pas moyen de trouver un vendeur disponible.

  • C'est le mois de juillet et les gens profitent de leurs vacances pour faire des travaux qu'ils n'auraient pas le temps d'effectuer dans l'année, vous voyez ... Dites moi comment puis-je vous aider.

  • Je voudrais déjà voir ce que vous avez comme bois puis faire découper sept planches aux dimensions notées sur ce bout de papier.

On est allé au fond du magasin . Il m'a montré tout un tas de planches mais aucune n'était en bois brut : aggloméré, osb, contreplaqué..

  • Les dernières planches en pin ont été vendues hier. J'attend une livraison prochaine. Vous pouvez repasser ?

Je suis allé dans une autre enseigne et les planches étaient pleines de neuds. Puis je me suis souvenu que j'étais en vacance. Alors j'ai pris mon short XXL de chez Macy's et suis parti à la rivière.

Round 6/42 écrit le dimanche 15 mars 2015

299 mots | 1809 signes

J'ai fini par trouver des planches dans une menuiserie. J'ai choisi une essence de Cupressus que j'ai fait découper aux bonnes dimensions. J'ai pensé à mon père qui m'avait appris quelques trucs de bricolage que je n'ai jamais pu mettre en pratique. Patricia me considérant comme un manchot incapable d'utiliser ses dix doigts.

En arrivant aux Espêches, j'ai entreposé les planches dans le corridor du rez de chaussée.

Le lendemain j'ai vidé toutes les étagères et posé les livres au sol. Il n'y avait presque plus de place pour marcher. J'ai parcouru les couvertures des ouvrages et réalisé que j'en connaissais très peu. Même si j'avais étudié la littérature française à l'université.
Puis j'ai pris un livre au hasard, me suis allongé sur le canapé et ai commencé à lire. Personne ne m'a demandé de ranger le bazar. Je ne m'étais pas senti aussi libre et bien depuis avant mon mariage. J'ai mis de la musique, me suis servi un verre et j'ai plongé dans l'histoire d'un polyglotte qui atterrit dans une ville où les gens parlent une langue incompréhensible. Par moment j'ai arrêté ma lecture pour écouter le silence de la maison ou parce qu'un volet grinçait dans la rue.

Je n'étais pas obligé de monter les étagères et pouvais laisser les livres par terre pendant des semaines.

Puis j'ai créé des zones sur le parquet avec les différents types d'ouvrages : poésie, romans, pièces de théâtre, essais. J'ai réalisé qu'à Lakeview nous n'avions presque que des livres de jardinage et de décoration ou des best seller que ma femme lisait en vacances. J'ai pris conscience de combien ça m'avait manqué.

Dans la soirée la fille de l'office de tourisme de Valence est passé. C'est drôle parce que c'est la meilleure amie d'Agnès.

Round 7/42 écrit le lundi 16 mars 2015

323 mots | 1846 signes

  • Je ne vous dérange pas ? Je surgis de ma pile de livres, pieds nus, mon antique t-shirt "keep calm and eat pizzas" flottant sur mon bide et cachant le haut d'un caleçon à rayures bleues et blanches. Je me lève en prenant appui sur le canapé. Puis enfin debout m'approche de la chaîne hifi pour baisser le volume sonore.
  • J'ai toqué à la porte en bas mais ça ne répondait pas alors je suis monté . Je ne supporte pas les gens qui demandent s'ils ne dérangent pas alors qu'il est clair qu'ils dérangent.
  • Carole, une amie d'Agnès. Elle souris
  • Je viens voir si tout va bien, vous ne manquez de rien ? poursuit-elle.
  • Non. Elle a l'air gênée, ne sachant où regarder mais tentant de capter le maximum d'informations.
  • Il fait beau, j'ai une grosse réserve d'abricots, de pastis et je m'attaque à la bibliothèque, dis-je en désignant le chantier autour de moi. C'est Agnès qui vous a demandé de passer ?
  • Ah non, pas du tout. Elle prend une mèche de cheveux entre ses doigts et commence à la faire tourner.
  • Est-ce qu'on ne s'est pas déjà vu ?
  • Sûrement dans mon dernier film, ou lors d'une interview. Je sais je ne passe pas inaperçu. Elle lâche sa mèche de cheveux.
  • Non je plaisante, dis-je.
  • Eh bien je ne suis jamais allé aux Etats-Unis alors..
  • Vous travaillez à l'office de tourisme et m'avez renseigné lorsque je cherchais un hébergement dans le coin.
  • Oui c'est ça. Je me souviens. Elle reprend sa mèche de cheveux.
  • Vous aimez lire ? Je pense à Patricia qui éteins la lumière à dix heures et moi trop occupé à digérer pour pouvoir me concentrer sur quoi que ce soit.
  • Oui, ça me plait J'ai enfin du temps, c'est les vacances et je suis seul. ça ne m'est pas arrivé depuis trente ans. C'est dingue mais ça me fait un bien fou de me retrouver seul.

Round 8/42 écrit le mardi 17 mars 2015

342 mots | 2048 signes

Carole me laissa son numéro de téléphone puis repartit. De nouveau seul, je repris le bouquin avec l'histoire du type qui devait participer à un congrès à Helsinki et s'est retrouvé perdu dans une ville étrangère. Il fallait que je passe chez la mère d'Agnès pour réparer son ampoule mais je n'avais pas envie de bouger. Cette maison c'était le paradis. Des livres, un patio avec des transats à l'ombre ou au soleil. Ma seul tâche étant d'arroser les plantes avant de me coucher. Je réussis à réparer le siège confort Lafuma qui s'était replié sur moi. Il fallait que je m'installe avec précaution.

Après l'histoire du type perdu dans une ville étrangère, je m'attaquai au mur invisible de Haushofer. Une femme isolée sur un alpage suisse. Ces deux fictions faisaient écho. J'étais seul moi aussi mais bien. Je savais que je pouvais appeler Agnès, faire un tour au village, voir Carole, Micheline mais j'avais envie de profiter de ces moments solitaires pour me redécouvrir, me reposer.

J'avais en tête les couleurs préférées d'Agnès : le vieux rose, les couleurs un peu passés, pas les couleurs qui claquent, les mi-tons, les demi-nuances, le pastel, les camaïeux aussi.

Je pensais acheter de nouveau draps et une housse de couette. Bien que la couette ne soit pas nécessaire en cette saison je me disais qu'il devait faire froid en hiver. Je me souvins du nombre de fois où Agnès s'était plainte du froid, du poêle qui ne chauffait pas toute la maison. Ce qu'il aurait fallu c'est une couette bien épaisse avec un homme à l'intérieur pour lui chauffer les pieds, un genre de gros nounours comme moi. En fait je ne m'étais jamais occupé de la décoration d'une maison. Je pris une feuille et notais ce qu'il manquait à cette maison. un bon lit : ça c'était fait des étagères : à faire dans quelques jours des draps doux de la couleur qui plairait à Agnès : trouver ça sur internet des bonnes choses à manger : il y avait les marchés pour ça. De belles perspectives !

Round 9/42 écrit le mercredi 18 mars 2015

274 mots | 1727 signes

Après cinq jours de paresse, je sortis de ma torpeur. La maison avait une forte odeur de bois de cèdre à cause des planches de Cupressus. Il était temps d'affronter ma peur de mal faire et me lancer dans la construction des étagères. Je rassemblai le matériel et dégageais les livres étalés sur le plancher.
Puis je construisis au sol un grand T avec trois planches : deux serviraient de montants verticaux et la planche horizontale consoliderait l'ensemble. Une fois les montants assemblés, je ne pus soulever la construction. J'attendis encore quelques jours, me remis à lire. J'avais terminé le mur invisible et commençai le roman d'un scénariste américain. L'histoire d'un gars qui malgré la quantité d'alcool ingéré n'arrivait plus à trouver l'ivresse. Il avait une relation autiste avec son fils et tombait amoureux d'une actrice .

Il me fallait de l'aide.

J'appelai Carole et il fut convenu que son mari Jacques passerait après le boulot pour m'aider. Cette fois ci j'entendis les martèlements contre la porte et descendis ouvrir. Jacques se présenta. De taille moyenne, le teint basané, il était dans la même tranche d'âge que moi.

Il soutint ma construction pendant que je la fixai au plancher puis au plafond avec la visseuse. Ensuite il me fallut fixer les autres planches horizontalement. - Vous ne visitez pas la région ? me demanda Jacques - Je devrais le faire mais j'avais d'abord besoin d'être seul un moment, pour me retrouver. - Nous allons faire une marche ce week-end, ça vous dirait de nous accompagner ? - Je ne suis pas un grand sportif - Nos deux garçons n'avancent pas très vite, ça ne devrait pas poser de problème. - Eh bien d'accord

Round 10/42 écrit le jeudi 19 mars 2015

224 mots | 1393 signes

Les livres ne tenaient pas tous sur l'étagère mais je pu débarrasser une partie du plancher. Je les classai par domaine puis par ordre alphabétique. Ce rangement me faisait du bien, j'avais l'impression de mettre de l'ordre dans mes neurones.

Dans la soirée Jacques me téléphona et nous convînmes d'une journée de randonnée le samedi suivant. Il fallait partir avant le lever du soleil à cause de la chaleur.

  • Vous avez de bonnes chaussures ?
  • Ouais des baskets.
  • Je voulais dire des chaussures de marche.
  • Non.
  • Quelle est votre pointure ?
  • 46
  • Dites donc vous avez de grands pieds
  • C'est pour mieux te manger mon enfant
  • Et une grande gueule !
  • Ha ha !
  • Trèves de plaisanterie, je n'aurais pas votre taille, désolé.
  • J'irais acheter ce qu'il faut

Enthousiasmé par la perspective de cette aventure, je retournai dans la zone commerciale pour acheter des chaussures de randonnée. Le samedi suivant, je mis le réveil. Carole et Jacques passèrent me prendre à l'aube en voiture. Nous roulâmes jusqu'à l'entrée d'une sente qui grimpait dans un bois de chênes liège . Carole me tendit un sac à dos. Elle s'était occupée de l'approvisionnement : eau, nourriture, barres de céréales. Les deux garçons de 8 et 10 ans étaient équipés comme des pros. Nous marchâmes une demi heure puis les choses commencèrent à se gâter.

Round 11/42 écrit le vendredi 20 mars 2015

231 mots | 1367 signes

Ce que je n'avais pas réalisé c'était que mes chaussures étaient neuves et que je n'avais pas eu le temps de les "faire" à mes pieds. La pente était raide, j'avais du mal à reprendre mon souffle. Les deux garçons couraient à l'avant. Carole les hélait pour qu'ils nous attendent. Je peinais à la traîne avec mes kilos en trop. Jacques me proposa une barre de céréale mais ce n'était pas de ça dont j'avais besoin. La dernière fois que j'avais marché aussi longtemps c'était à l'âge de treize ans lorsque nous étions parti en camping dans les smoky mountains avec mon oncle. Je sentis la plante des pieds me brûler. j'étais sûr d'avoir des cloques.

Il se mit à pleuvoir. D'abord de fines gouttes puis un peu plus. Personne n'avait de blouson. Jacques dit que ce devait juste être une averse, ça allait passer. J'avais envie de rentrer, lire. Je pensais au siège confort du patio et ce que j'étais allé faire dans cette galère . - Allez les gars, dit Jacques, on coure jusqu'au prochain chêne. Le premier arrivé en haut de la côte a gagné. ça ne risquait pas d'être moi en tout cas. L'ampoule qui s'était formée sous mon pied commença à me brûler sérieusement. - On en a encore pour longtemps ? dis-je. Carole haussa les épaules, désignant le sommet du regard. - Ah. J'inspirais. Encore deux heures quoi.

Round 12/42 écrit le samedi 21 mars 2015

469 mots | 2835 signes

J'étais loin d'être un gamin obèse dans ma jeunesse. Mes parents me gavaient de porridge, saucisses et hamburgers mais comme je me dépensais beaucoup, ça compensait. C'est après le mariage que les choses ont commencé à se gâter. Ma femme brassait tellement d'air que j'ai arrêté de faire des moulinets avec les bras, pour dire stop où tu vas comme ça où on va tous les deux ? Patricia ne m'a pas écouté, elle a monté sa boîte, ça a marché, il n'y a plus eu que ça qui l'intéressait. J'étais à la maison, m'empâtant, construisant une carapace moelleuse pour résister à ses assauts, ses critiques incessantes. Comment l'ai-je supporté aussi longtemps ? autodestruction ?

La pluie a cessé. J'ai dit à Carole que je redescendais. J'avais les pieds en feu et le souffle court. Je les attendrais en bas. Je me suis assis un moment, observant leurs silhouette disparaître au loin puis j'ai baissé la tête vers ce qui grouillait par terre entre les herbes. J'ai imaginé que j'avais rétréci, que je partais à l'aventure chevauchant une fourmis. J'ai vu une libellule qui fonçait sur moi et je me suis fait peur. Puis j'ai enlevé mes chaussures, regardé les ampoules qui s'étaient formées, me suis massé les pieds. Miracle ! j'arrivais à toucher mes pieds moi qui l'an passé ne pouvait même pas lacer mes chaussures. Je me suis levé et j'ai avancé à la vitesse d'un escargot, sentant toutes les aspérités du sol sous la plante de mes pieds. J'ai ramassé du thym, de la sarriette, des brins de lavande sauvage. Le soleil n'était pas encore ardent, j'ai regardé le ciel, la vue magnifique. Même si je n'étais pas arrivé au sommet, j'avais pris un nouveau départ et la vie maintenant ça allait être de faire des petits pas chaque jour, à mon rythme, sans souffrance. Je pourrais même continuer à manger des brioches pour le goûter et du chocolat. Tout cela n'avait aucune importance parce que j'aimais Agnès et à travers cet amour je commençais à m'aimer moi. Parce qu'elle avait vu celui que j'étais au delà de mon apparence, avec un regard qui ne me jugeait ni ne me jaugeait. J'ai remercié les fleurs, les petites fleurs insignifiantes. Qui étais-je pour dire que ces fleurs étaient insignifiantes. J'ai contemplé, écouté le silence puis derrière le silence, le souffle du vent, le chant des oiseaux, j'ai imaginé les bruits que faisaient les pattes du scarabé qui traversait le sentier, des cailloux qui roulaient avec le vent, des feuilles qui vibraient. Puis j'ai arrêté mes pensées et c'était beaucoup mieux ainsi. Je me suis laissé entrainer dans la descente, j'ai pris de la vitesse et ma graisse a fait flip flop avec l'impulsion de mes pieds. J'ai pensé à Agnès, je n'avais pas pris mon portable, j'aurais voulu l'appeler.

Round 13/42 écrit le dimanche 22 mars 2015

320 mots | 1888 signes

Arrivé en bas, je me suis assoupi dans l'herbe en attendant les autres. Carole, Jacques et les deux garçons sont arrivés quelques heures plus tard, les jambes en coton mais visiblement heureux. Ils m'ont déposé aux Espèches et on s'est promis de se revoir plus tard.

J'ai calculé l'heure qu'il était chez moi avec le décalage horaire pour savoir si Agnès serait réveillé aux Etats-Unis et j'ai décidé de l'appeler. Elle a tout de suite décroché. - C'est moi Ethan, j'avais envie de t'entendre. Tu es déjà levée ? - Oui je suis sur le fauteuil pivotant de ton bureau. Tu entend le bruit que ça fait ? - C'est bête que tu n'ai pas de webcam ici - T'as déjà dit ça Ethan - Quand est-ce qu'on se revoit ? - Sur swapworld ou en vrai ? - Je me demande juste qu'est ce qu'on va faire après l'échange de maison ?

Mon désir secret était d'attendre qu'elle ai fini ses vacances, d'aménager sa maison durant les trois semaines, perdre encore du poids, me faire beau, vivre plus longtemps puis aller la chercher à la gare.

  • Tu comptes divorcer ?
  • Je n'ai pas vraiment réfléchis à ça.
  • J'ai vu ton voisin, Nikkos hier, c'est un gars marrant
  • Méfie toi c'est un séducteur

J'avais envie de l'étreindre. J'aurais pu prendre un avion plus tôt mais j'aurais été gêné qu'on soit ensemble dans ma maison.

  • Tu me manques.

Je ne voulais pas lui dire que je prononçais son prénom sans m'en rendre compte, que je la voyais dans les livres, je l'imaginais en train de cuisiner, dormir. Sa maison était emplie par son âme.

  • Tu te souviens du jour où tu m'as envoyé ce mail et que nous avons décidé d'échanger nos maisons
  • Oui -On a fait un sacré bout de chemin tous les deux

Je me voyais me marier avec Agnès. Je me voyais dans un costume chic, taille XL et ce n'était pas catastrophique mais plutôt joyeux.

Round 14/42 écrit le lundi 23 mars 2015

524 mots | 2916 signes

Agnès Dans l'avion, Justine n'a pas arrêté de me poser des questions sur Ethan, pourquoi il était venu plus tôt chez nous. J'ai esquivé mais depuis qu'on est dans la maison de Lakeview je pète les plombs. Elle ne m'écoute pas. Je lui parle et elle détourne la tête comme si je n'existais pas. Parfois je la regarde et je me demande de qui elle tient. J'ai l'impression que ce n'est pas ma fille. Elle met le bazar partout où elle passe. La maison si bien rangée est méconnaissable. J'ai peur qu'elle casse quelque chose. Elle a des accès de colère tellement soudain. Elle me fait peur tant elle est incontrôlable. Capable de balancer une assiette par terre sans pouvoir se retenir. Comme si la soupape débordait, qu'elle avait accumulé tant de violence contenue et que là tout sortait.

Ce n'est pas du tout les vacances que j'imaginais.

Hier elle a fait du chantage, disant que si je continuais à voir Ethan, elle habiterait avec son père et sa compagne parce que eux au moins ils sont cool et ils ont de l'argent. Je ne sais pas si Richard est au courant. Lui qui ne voulait pas d'enfant c'est vers lui qu'elle se tourne à présent. Tout ce auquel je crois elle s'en fout. J'en ai assez d'être la seule à dire non. Son père lui cède tout et lorsqu'elle revient à la maison elle trouve que ce que je prépare est mauvais, que la maison est moche. ça me mine, tous les jours ça me mine un peu plus. Déjà que je n'ai pas confiance en moi. Ce qui l'intéresse c'est de pouvoir s'acheter plus de fringues, d'être dans un lycée où il n'y aurait plus les bolos de province. Elle se fout de moi. Quand je pense à toute l'énergie que j'ai mise à l'élever, il ne reste rien de tout cela, que des malentendus.

Comment est-ce qu'on va faire pour passer ce temps ensemble ? Juste à deux. Si au moins elle avait des amis. Les voisins ont un fils, peut-être que je pourrais leur demander d'inviter Justine pour qu'elle améliore son anglais.

Elle me tanne pour qu'on aille à New York mais c'est loin. Elle trouve que la maison de Lakeview est dans un trou paumé, ce qu'elle voudrait c'est aller dans les grandes villes. Pourquoi est-ce qu'on est pas resté à Boston après que l'avion ait atterri. Je me sens paumé.

J'ai appelé Carole elle m'a dit qu'ils avaient fait une randonnée avec Ethan et Ethan m'a appelé après. Je l'aime bien, j'aime bien parler avec lui, c'est quelqu'un qui me respecte. Lui aussi a été malmené par sa femme. On est tous les deux des victimes il faut que ça change. Il me demande quand est-ce qu'on se revoit. Je ne sais pas quoi faire de ma vie. J'ai peur de trop de bonheur d'un coup. Mais si Justine rentre à Paris pourquoi est-ce que je ne resterais pas avec Ethan ou lui chez moi ? Je pourrais raccompagner Justine puis l'aider à déménager. Mais elle est encore si jeune, j'ai peur de la perdre. pour de bon.

Round 15/42 écrit le mardi 24 mars 2015

517 mots | 2955 signes

Ethan

Bikkie m'a appelé hier soir. Dingue d'entendre sa voix. il m'a dit qu'il était passé voir Agnès. Mais comment a-t-il fait pour trouver mon adresse ? Franchement ce mec me fait peur. Il se mêle de ce qui ne le regarde pas. Il m'a dit qu'il voulait voir à quoi ressemblait mon rêve, en parlant d'Agnès. Je ferais mieux de rentrer, ça me fout les jetons. Il voulait déposer l'argent dans la boîte aux lettres et il est tombé sur Agnès, il croyait que c'était ma femme.

Les gars de Litrirêve sont venus changer la vitre du patio. Je n'ai pas eu à les prier pour qu'ils viennent boire un pastis. - Vous pourriez pas faire réviser ma fille, elle a de grosses difficultés en anglais ? - et l'Amérique c'est comment hein c'est comment ? vous voulez pas m'inviter ?

Le soir je suis allé dîner chez Carole et Jacques. ça me fait bizarre, j'ai l'impression de vivre la vie d'Agnès sans qu'elle ne soit là. Comme si en prenant sa maison, j'avais aussi pris sa vie. Il ne manque plus que j'aille bosser au centre de loisirs. Ben justement, Jacques m'a proposé de faire une intervention là-bas pour parler aux gamins de mon pays. comme si j'avais que ça à faire. Je crois plutôt que je vais me barrer à Marseille, prendre la route à l'aube. J'ai besoin d'air. La vie d'Agnès, ses amis commencent à prendre trop de place. Ce n'est pas bon du tout. J'étais venu ici pour faire une pause et pas moyen d'être tranquille. c'est ça la vie dans un village français ? sont chiant à vouloir tout savoir sur moi, m'épier. Après c'est Micheline qui m'a appelé pour me demander quand je pouvais passer réparer son ampoule. Je veux bien être sympa mais j'ai l'impression d'être le sauveur du village, là. Demain c'est la fête du 14 juillet. Il y aura un feu d'artifice, un bal. Carole m'a appelé pour savoir si je voulais aller avec eux en ville. Vite me tirer à Marseille. Il n'y aura plus d'Ethan à l'adresse indiquée. Ce qu'Agnès ne m'avait pas dit, c'est qu'en prenant sa maison, j'aurais aussi tous les intrus autour de moi, moins de tranquillité qu'à Lakeview. Je regrette les jours où je lisais toute la journée. Maintenant si je traîne en pyjama, j'ai peur que quelqu'un débarque pour prendre un pastis ou me demander de l'aide pour bricoler.

J'ai préparé une valise avec des fringues, un sac de couchage et c'est parti pour l'aventure. J'ai aussi pris quelques bouquins. Je roulerais la nuit pour éviter les embouteillages. ça fait combien de temps que je n'ai pas vu la mer ? une mer plus chaude que l'Atlantique ? Allez me font tous chier, je largue tout, ma maison, la maison d'Agnès. J'ai assez de fric pour tenir jusqu'à la fin juillet. Je n'ai même pas pris mon billet retour, il faudrait que je réfléchisse à ça. Je commence à avoir l'accent du Sud quand je parle en français, les gens ne voient même plus que je ne suis pas des leurs, un vrai caméléon.

Round 16/42 écrit le mercredi 25 mars 2015

485 mots | 2878 signes

Ethan

J'ai chargé la voiture d'Agnès dans la soirée avec des affaires pour quelques jours. J'étais tout excité. L'impression de liberté me gagnait. Je ne savais pas encore si j'irais jusqu'à Marseille, je voulais juste descendre l'A7. Le lendemain à six heures il y avait pas mal de circulation, plein de camions. Peu après l'embranchement de l'autoroute, je me suis arrêté dans une station service pour faire le plein et au moment de payer une fille m'a demandé si j'avais une place pour elle dans la voiture. Son mec l'avait largué. La fille était un peu grosse comme moi, plus toute jeune et elle portait des tresses sur les côtés comme une gamine.
- où est-ce que vous allez ? je lui ai demandé. - à Avignon, faut que je retrouve ma fille. Elle tournait ses tresses entre ses doigts en parlant. - En fait j'étais parti pour être seul, vous voyez. - Je saurais me faire toute petite, je ne parlerai pas. Dès qu'elle est monté dans la voiture et que j'ai démarré j'ai senti que j'avais fait une connerie, Il y avait une grosse tension dans l'air. On a roulé jusqu'à Montélimar puis elle a commencé à s'agiter sur le siège. - Je me suis pas fait larguée. - Ah? où est le problème alors ? Elle s'est passé la main dans les cheveux et a recommencé à tourner ses tresses comme si ses cheveux avaient une existence propre et la capacité de donner une réponse à la place de sa bouche. - t'es un touriste ? Je me suis tourné vers elle l'air incrédule, ai hoché la tête plusieurs fois, me demandant si la fille n'était pas totalement dingue. - pas grave. Elle regardait ses jambes. J'ai continué à rouler. Il y avait encore pas mal de kilomètres jusqu'à Avignon. Je me suis dit encore une heure et je serais tranquille. - Hum, désolée, j'ai envie de pisser et je ne voudrais pas salir ta caisse. Là c'était le coup de grâce. Faisait chier ces français avec leurs comportements bizarres, faux jetons. Tout ces gens du Sud à se vanter ou profiter du système. La fille s'agitait sur le siège. J'envisageai de la laisser à la prochaine aire d'autoroute et de démarrer sans l'attendre. Un panneau avec le picto toilettes indiquait la prochaine aire de repos dans 3 kilomètres. J'avais envie de rentrer chez moi. J'ai ralenti puis pilé sur le parking - Voilà, j'ai dit. La fille a sorti un couteau de son sac et m'a menacé. - Changement de programme, tu dégages ! - He ça va pas ? - Maintenant, tu sors de la voiture ! - Tu sors où je te plante ça dans la cuisse J'avais presque rien, mon portable dans la poche arrière, un peu d'argent ce qui m'embêtait c'est que c'était la voiture d'Agnès Je me suis retrouvé sur le parking de l'aire d'autoroute, il y avait juste une baraque avec les toilettes et la radio à l'intérieur. Je me suis assis sur le siège et j'ai pleuré.

Round 17/42 écrit le jeudi 26 mars 2015

591 mots | 3514 signes

Ethan - péripéties

ça puait la pisse à l'intérieur. Je repensai aux toilettes immaculées de la bibliothèque de Williamstown et me mis à pleurer de plus belle. Même pas de papier ici pour essuyer mes yeux. J'allumai mon portable. Aucun message. Ni d'Agnès ni de ma femme.

Au bout de dix minutes la lumière s'éteignit, la porte des toilettes que j'avais pourtant verrouillée s'ouvrit toute seule et la chasse d'eau se déclencha alors que j'étais encore assis sur le siège. Le jet trempa mon pantalon et éclaboussa mes basket. Je fis un bond, puis réalisai que le programme de nettoyage automatique arrivait maintenant à la deuxième phase : désinfection du sol et des murs. De multiples jets sortirent des parois et aspergèrent l'habitacle. Je fis des sauts entre les flaques et me précipitai dehors. Les yeux me piquaient à cause du produit de nettoyage. Damned restroom !

Sur le parking, heureusement aucune voiture ne stationnait.

Plus question de faire du stop trempé comme j'étais. Je ne me voyais pas poser mon postérieur mouillé sur la banquette d'un inconnu. Les voitures défilaient sur l'autoroute sans égard pour ma condition de rescapé. Sur que si quelqu'un me voyait il me prendrait pour un dingue. J'inspectai rapidement les alentours. Une grille ceignait l'aire de repos. Elle était assez basse pour que puisse l'enjamber. Je marchai en direction de la grille lorsqu'une voiture pila sur le parking. J'activai le pas puis me retournai. Un gars descendit de la voiture et me fixa. Je fis semblant d'être l'homme de ménage et me mis à sortir les sacs des poubelles qui entouraient l'aire de jeux prenant tout mon temps. Dès que le mec entra dans les sanitaires, je filai jusqu'à la grille et me hissai de toutes mes forces. "Thor vient à mon secours" pensai-je. Le barbelé s'accrocha à la poche avant de mon jean et le déchira . Je m'écroulai par terre de l'autre côté quand je vis le type ressortir des toilettes et me fixer à nouveau. Je me levai, époussetai mon pantalon d'un air désabusé, puis fixai le ciel comme si un hélicoptère allait venir me chercher après ma mission de ménage.

Mes chaussures étaient dégueulasses, de la terre imprégnait la toile mouillée. Devant moi s'étalait un champs de maïs. Je me mis à marcher tout droit entre les épis mais avec mon envergure les plantations raclaient mon torse. Je marchai sans me retourner jusqu'à être hors de vue du parking. Je me souvins que mon portable se trouvait dans la poche arrière de mon jean et le sortis. La coque était trempée. J'essuyai l'appareil contre la partie sèche de mon tee-shirt. Il aurait fallut que je le plonge dans un sac de riz pour absorber l'humidité. J'appuyai sur éteindre puis soufflai dessus en espérant que la partie électronique ne soit pas endommagée. Pas moyen d'appeler les secours ni Agnès. De toute façon je ne me voyais pas lui annoncer qu'une grosse brune à tresses avait filé dans sa twingo. Au loin, des champs à perte de vue : ni routes, ni villages. Une hirondelle stationna un moment au dessus de ma tête et je pensai à Patricia sur une plage à West Palm Beach avec nos jumeaux. Si elle savait. Je calculai l'heure qu'il était chez moi. Je continuai à marcher sur le sol rugueux, mes baskets de plus en plus sales. Enfin j'aperçus un tracteur au loin. Je me souvins de mon père perché sur son John Deere. J'aurais pu devenir comme lui si je n'avais pas été à l'université.

Round 18/42 écrit le vendredi 27 mars 2015

410 mots | 2390 signes

Ethan péripéties Le tracteur se mit à klaxonner. Je sursautai. Un type à l'intérieur sortit la tête de la cabine et gueula : - Hé vous là-bas qu'est ce qui vous prend de saloper les cultures ! Le moteur continuait de tourner. - Je salope pas les cultures, j'essaie de retrouver la civilisation. - Oh, ça va pas la tête ! Le gars coupa le moteur et sortit. Il était petit, hargneux, pas rasé, les cheveux châtains, le visage rougi par le soleil. Je le regardai droit dans les yeux et dit tranquillement : - Non ça va pas, je suis trempé, une dingue à tresses vient de me piquer ma voiture, je suis à 6000 kilomètres de chez moi, et il me reste vingt euros en poche. Le gars se mit à tasser la terre avec ses pieds et remettre les épis de mais que j'avais vaguement déplacés en marchant. - C'est ça ouais, c'est ça. Il remonta dans sa cabine, mit le moteur et repartit. Il alla jusqu'au bout du champ, fit demi-tour et repassa devant moi. - Vous comptez rester longtemps sur mes cultures ? - Excusez je ne fais que passer, auriez vous l'obligeance de m'indiquer la direction du prochain village ? - Eh bé, faut bien compter 7 kilomètres mon gars. Je regardai mes baskets trempés, les trous dans mon jean et me mis à rire nerveusement. - Allez montez, on ne fera pas 6000 kilomètres mais je vous amène à la ferme dès que j'aurais fini mes rangs. ça puait les pieds à l'intérieur de la cabine. - Mon père était fermier dans le Massachussetts. -Mate sa chaussette ? - C'est un état en Amérique. - Je me disais bien que vous n'aviez pas une tête du coin. Juste au dessus du pare-brise était scotchée la photo d'une femme les seins nus. Il y avait pas mal de poussière ce qui fait qu'on ne distinguait pas grand chose. Nous roulâmes à petite vitesse, empruntant une voie goudronnée en sortant du champ. Après le premier village il bifurqua sur un chemin de terre qui menait à une ferme. Il gara le tracteur sous un hangar et nous descendîmes tous deux. La porte d'entrée de la ferme donnait sur une cuisine dont la table était encombrée par des piles de paperasses. - Le téléphone est là, sur le buffet. -Je ne connais pas le numéro de la police. - le 17. Je composais le numéro et une voix me dit de patienter. - Ma femme était bien en chair, un peu comme vous. Elle s'est barré avec le voisin.

Round 19/42 écrit le samedi 28 mars 2015

348 mots | 2062 signes

"Vous avez demandé la police ne quittez pas..." Une oreille sur l'écouteur du téléphone, je tentai de me concentrer pendant que le fermier me racontait ses déboires avec sa femme. - Oui j'écoute. - Heu c'est la police ? - Oui j'écoute. - Je viens de me faire piquer ma voiture. - Immatriculation s'il vous plait ? - Immatriculation ? ben je sais pas. En fait c'était la voiture d'une amie. - C'est au propriétaire de faire la déclaration. Pour cela la personne devra se rendre au commissariat le plus proche de l'endroit où a eu lieu le vol. - Elle est pas là. Heu je veux dire elle est pas en France la personne. - Attendez, je vais me renseigner. "Vous avez demandé la police ne quittez pas..." Ma femme s'appelle Cindy, c'est américain comme vous. C'est sa mère qui a choisi le prénom à cause de Lauper sauf qu'ils se sont trompé dans l'orthographe. -Lauper ? - Cyndi Lauper, sa mère était fan. - Je connais pas. "Vous avez demandé la police ne quittez pas..." Je me demandai si je ne ferais pas mieux de raccrocher. - Monsieur ? - Oui. - Le mieux serait d'appeler l'ambassade ou bien l'assurance. Je ne peux rien faire si je n'ai pas le numéro d'immatriculation. - Bon je vais me renseigner. Me tournant vers le fermier : - J'ai un autre appel à passer, ça ne vous dérange pas ? - Non. Cindy Lauper vous savez la fille de trou color. - Désolé, je ne suis pas très variétés. J'allais pas dire au fermier que j'appelai aux US et composai le numéro de Lakeview. Au bout de six sonneries, j'entendis la voix de Patricia déclamant le message du répondeur. Je décidai de composer le numéro de portable de mon fils. - Allo ? - Alex ? ça se passe bien en Floride ? - Papa ? tu sais l'heure qu'il est ? - Ouais désolé fiston. Je suis dans la mouise, quelqu'un a volé la voiture de la dame des Espêches, je suis largué dans la campagne. Est-ce que tu as un ordi avec toi ? - Ouais. - Trouve moi le numéro d'un centre d'assistance, genre avec ma carte bleue. - Vous voulez un café ?

Round 20/42 écrit le dimanche 29 mars 2015

283 mots | 1604 signes

  • Papa tu sais quoi ? il est trois heures du matin ! On a fait la tournée des bars avec Trevor et le fils de Gina. Est-ce que je ne pourrais pas me rendormir trois heures et tu me rappelles. C'est pas si urgent ?
  • Passe moi Patricia, va.
  • Elle n'est pas encore rentrée.
  • Mais tu m'as dit qu'il était trois heures !
  • Exact.
  • Qu'est ce qu'elle fout alors ?
  • Je suppose qu'elle s'amuse.

Je respirai un bon coup puis frottai mes mains sur mon pantalon nerveusement. Le jean était toujours mouillé à cause du jet que j'avais reçu dans les toilettes de l'aire d'autoroute.

  • Merci Alex. Je raccrochai. Une boule restait coincé dans ma gorge. l'impression de ne plus avoir personne sur qui compter.

  • ça va comme vous voulez ? me demanda le fermier.

  • Non, pas vraiment, je haussai les épaules puis repris, est-ce que vous auriez du riz ? Mon portable a pris l'eau.

Il hocha la tête, ouvrit un placard et en ressortit un paquet poussiéreux d'oncle bens.

  • Un sac ?

Il me tendit un sachet plastique vert bouteille. Je le remplis avec du riz puis plongeai mon portable dedans.

  • Je vais vous demander un truc fou mais ça vous embêterait de me déposer dans un village à une centaine de kilomètres de là ? Je vous dédommagerais bien sûr.
  • C'est que j'ai l'étable à nettoyer.
  • Je vais vous aider, ça ira plus vite et on parlera de Cindy.

Dans l'étable il y avait des brebis - Elle habite où maintenant Cindy ? - Je n'en sais rien, on était pas marié, elle voulait pas. Elle en a eu marre de la vie ici, la maison qu'est pas moderne et tout.

Round 21/42 écrit le lundi 30 mars 2015

333 mots | 1879 signes

Il y avait du foin sur les tapis de sol de la 205 du fermier. ça puait le vivant, le palpitant, loin des comptoirs aseptisés d'Amérique. Le gars ne devait plus trop se laver depuis que sa copine avait pris le large.

  • Je serais vous je ferais la déclaration à la police quand même.

  • La voiture ne m'appartient pas.

Il voulait prendre la nationale 7 pour ne pas payer le péage. En passant à Loriol, je crus voir la voiture d'Agnès devant un café. Je dit au fermier de piler illico.

C'était vraiment la twingo verte avec un autocollant du "réseau sortir du nucléaire" mais il y avait un môme à l'arrière. Le fermier gara la voiture et j'ouvris grand mes pupilles pour essayer de reconnaître la fille à tresses. Il ne fallait pas que je me fasse repérer. Je fis un rapide calcul. Elle avait démarré sur l'aire d'autoroute à 7 heures, j'avais marché dans le champs, le fermier était arrivé sur son tracteur à 8h, on était allé chez lui, je l'avais aidé à nettoyer l'étable, on avait filé et là il était 11 heures. Je pris un emballage de chewim-gum et notai le numéro d'immatriculation dessus. A 11h10 je vis la fille sortir du bar un paquet de clopes à la main.

  • On va les suivre, dis-je au fermier.

  • eh mais j'ai autre chose à faire.

  • J'ai pas dit que j'allais vous dédommager ?

La fille à tresses rentra dans la twingo et démarra. Je m'arrangeai pour me mettre en boule à l'arrière de la 205. Il ne fallait pas que la fille me reconnaisse. Le fermier suivit. Elle emprunta une route de campagne qui arrivait jusqu'à une ferme avec des lamas qui broutaient dans un pâturage. Le fermier garda sa distance pour ne pas se faire repérer et s'arrêta avant l'entrée de la ferme. La fille détacha son gamin à l'arrière puis ils sortirent de la voiture . Un gars chevelu sortit de la ferme en gueulant.

Round 22/42 écrit le mardi 31 mars 2015

262 mots | 1516 signes

La fille à tresses s'avança vers l'entrée de la ferme. Le petit garçon ne voulait pas la suivre et trépignait. Je ne savais pas s'il fallait attendre ou sortir de la voiture. Un lama se mit à frotter son museau contre la carrosserie. - Bon je dis au fermier, vous avez l'air costaud. J'avais les jetons. - Vous allez venir avec moi, ça sera plus facile. poursuivis-je. J'ouvris la portière et le lama se mit à hennir. La fille à tresses et le chevelu se retournèrent et nous virent. La fille avait l'air ahuri de me voir. Je dis : - Le Big brother t'as repéré ! - C'est qui ce type ? demanda le chevelu. Le petit garçon se mit à geindre en tirant sur la veste de la fille. - Maman, je veux rentrer à la maison. - Attend une minute Quentin, faut qu'on s'explique d'abord, puis se tournant vers le chevelu : - Monsieur m'a prêté son véhicule pour que je récupère Quentin chez ma mère après que tu m'ait larguée à la station service. Elle mit une main dans sa poche, en sortit des clés qu'elle me lança. - C'est la twingo là-bas ? Il fit demi-tour, marcha jusqu'au véhicule. - Cte bagnole avec l'autocollant. c'est pas la caisse à Agnès ? - La caisse à Agnès, ça sonne bien. dit le fermier. - Vous connaissez Agnès ? lui demandai-je. - Ouais c'est ma copine. - T'as une copine maintenant ? dis la fille à tresses. - Si je puis me permettre, je n'ai pas le souvenir qu'Agnès m'ait parlé de vous. Pourtant je crois bien la connaître. - La ferme le gros.

Round 23/42 écrit le mercredi 1 avril 2015

288 mots | 1677 signes

  • Le gros il te merde . Je portais un short de randonnée avec de grosses poches sur les côtés des cuisses et j'avais mis le sac de riz avec mon téléphone à l'intérieur. je le sentis vibrer. C'était Alex.
  • Je viens aux nouvelles pour la voiture.
  • ça va. tu peux me passer ta mère ?
  • ma mère ?
  • ma femme quoi.
  • Elle est repartie. Elle est rentrée puis elle est repartie.

Le fermier et moi nous repartîmes à deux voitures en direction des Espêches. Nous nous arrêtâmes dans un bar au village voisin. Je tirai deux cent euros au distributeur le plus proche et en donnai cent au fermier. - Est ce que ça ira ? - Non. qu'on n'en reste pas là. Je lui promis de lui envoyer une carte postale des Etats-Unis lorsque je serais rentré et de l'inviter s'il voulait découvrir les tracteurs du Massachusetts.

Est-ce que je devait appeler Agnès ? Il devait être six heures du matin . qu'est-ce que j'allais lui dire ? que l'ex femme du chevelu qui élève des lamas lui avait volé sa voiture ? Aucun intérêt.

Alternative : Le fermier me déposa aux Espêches. Je pris cent euros dans la poche intérieure de ma valise, lui tendit. Il me remercia, moi aussi. Nous bûmes une bière dans le patio. Il regarda tous les livres, me dit je ne savais pas que ça pouvait exister tout ces livres. -Qu'est-ce que vous me conseilleriez en premier ? - Vous aimez rire, vous avez envie de pleurer, de réfléchir ? - Trouver un sens. - Cormac Mac Carthy. La route. ça pourrait vous plaire. - Prenez cet exemplaire. J'en achèterai un neuf pour l'habitante des lieux. -Et après vous pourrez me conseiller. ? - Bien sûr que je pourrais.

Round 24/42 écrit le jeudi 2 avril 2015

464 mots | 2923 signes

Je décidai de repartir jusqu'aux Calanques de Cassis. Sans autostoppeuse cette fois. Là je me baignai, mangeai du poisson, dormit sur la plage derrière un figuier de Barbarie dont quelques épines se plantèrent dans la paume de ma main. Repris la voiture, suivit la côte puis passai la frontière enchaînant les tunnels entre Ventimille et Ligure, roulait jusqu'à Gênes où je trouvai un hôtel sans charme. J'étais sans nouvelles d'Agnès et de ma femme. Puis je me posai aux cinq terres certain d'avoir trouvé l'endroit idéal. A Levanto, je logeai dans une pension via San Nicolo. Le propriétaire Angelo me prêta une place de parking et m'indiqua la gare qui menait aux différents villages perchés. Je pris le train et marchai, me baignai près d'un minuscule ponton à Corniglia, rencontrai sur les sentiers assez fréquentés des groupes d'étudiants américains faisant leur tour d'Europe, certains d'être les rois du monde. Je grimpai entre Monterosso, Vernazza, Manorola, Riomaggio. Me lavai les yeux de bleu, d'ocre. Puis en eu assez de toute cette beauté, voulut retrouver des paysages plus anodins. Après cinq jours je filai jusqu'à Naples, garai la voiture dans le parking gardé d'un hôtel deux étoiles, pris le bateau pour Ishia, trouvai qu'il y avait trop d'allemands, retournai à Naples, filai jusqu'à Amalfi, nageais encore. Subjugué pas la beauté des italiens, des italiennes, moi si différent, encore si gros, seul aussi car je ne parlais pas la langue et tellement repérable. Je remontai par les routes du centre, trouvai un ermitage à côté du lac Trasimène que les touristes avaient déserté. beaucoup de moustiques, la chaleur. Continuer à avancer.

Est-ce que j'avais déjà passé des vacances comme celles là, à me laisser porter ? Je repensais à mon boulot de traducteur. Ce que je ferais en rentrant. Les contrats qui allaient revenir. J'avais mis ma boîte mail sur réponse automatique jusqu'à début aout mais certains clients connaissaient mon numéro de portable. Pas d'appel pourtant.

Je trouvai un hôtel avec spa. Dans les vestiaires je montai sur la balance et m'aperçus que j'avais perdu dix kilos depuis mon départ d'Amérique. Je m'achetai deux nouveaux shorts dans un centre commercial et laissai les vieux dans un récupérateur de textiles. Tout ce poids que j'avais traîné depuis des années, à quoi ça m'avait servi ? si ce n'est à me ralentir, à m'empêcher. Pourquoi ? à cause de mes parents qui ne s'étaient pas occupé de moi, qui m'avaient ignorés. Quel fils j'avais été pour eux ? Tous les deux morts, isolés, sans jamais être sortis de leur comté, toujours au même endroit, enterrés dans le cimetière de ??. Paix à leurs âmes.

Puis Agnès m'appela enfin. Sa fille avait cassé un vase ancien que Patricia avait acheté lors d'une vente aux enchères, elle était ennuyée et me parut lointaine.

Round 25/42 écrit le vendredi 3 avril 2015

382 mots | 2252 signes

L'appel d'Agnès me fit revenir. Comme s'il fallait que je m'imprègne de sa maison à nouveau. Poser mes fesses sur les chaises défoncées de sa cuisine, entendre parler français, cuisiner. J'en avais assez de la pasta, des gelateria, des touristes qui n'arrêtaient pas de s'esclaffer et jeter leurs mots "oh que c'est beau, amazing, estupendo, incredibile" et leurs déchets au bord des chemins. Pollueurs de beauté. Me poser entre les murs et reprendre ma lecture. La route entre le lac de Trasimène et Les Espêches, je la fis en trois jours. J'avais dit à Agnès que j'étais en vadrouille, c'était tout. En vadrouille, l'esprit aussi brouillé, dans un espace entre deux pas. Entre deux eaux. Comment ai-je fait pour avaler tout ces kilomètres sans faiblir en dormant dans des hôtels à 39 euros la nuit, mangeant n'importe quoi. Comment ? Pourquoi ? A un moment je me suis arrêté et me suis posé l'habituelle question : finalement est-ce que ça vaut le coup de sortir de l'ornière ? La vie n'est pas censé être quelque chose de confortable ? Non. Il fallait que je me pose la question. Et aussi que resterait-il de cette échappée ? à part de beaux souvenirs qui s'enfuiraient eux aussi ? à un moment j'ai pensé que j'aurais bien aimé avoir une soeur ou des parents à appeler, mais il étaient tous au cimetière. Il se mit à pleuvoir après le tunnel de Fréjus. Je n'avais pas réalisé que la route deviendrait aussi sinueuse. J'avais calculé l'itinéraire sur mon portable sans me rendre compte que j'allais passer de l'autoroute à la départementale. La pluie ne cessa pas et l'orage vint. Orage de montagne danger. Je décidai de m'arrêter un moment en attendant que ça passe. Il me restait un peu d'eau au fond d'une bouteille et quelques gâteaux secs. Je n'aime pas les intempéries. Elles me font peur. Quand j'étais petit un cyclone avait fait s'envoler le silo à grain de notre ferme. L'oeil du cyclone était juste au dessus du silo. Et la tôle s'était soulevée dans l'air. Mes parents avaient trouvé refuge dans la cave de la ferme. On regardait l'extérieur par une petite ouverture. Je crois bien que j'étais terrorisé mais je n'osais pas le dire. Les mains de ma mère tremblaient.

Round 26/42 écrit le samedi 4 avril 2015

497 mots | 2960 signes

L'orage continuait. J'avais beau me dire que la carcasse de la voiture constituait la meilleure protection, telle une cage de Faraday, j'étais terrorisé. Les éclairs fusaient sur le champs devant moi, tout proches. Je savais qu'il ne valait mieux pas utiliser mon téléphone. Combien de temps cela allait durer ? Je calculai le temps entre le grondement du tonnerre et l'éclair pour savoir à quelle distance se situait le problème. Proche, très proche, trop proche. Je n'osais pas bouger, mettre la radio, rien. Je pensai à mon bureau, aux paquets de céréales de mes fils dans le placard de la cuisine, la cheminée et mes catalogues de bulbes et graines diverses. Je me voyais jardiner au soleil, dans mon ancienne vie avec Patricia, chiante mais tout était confortable alors, il n'y avait aucun risque, il n'y avait jamais eu de risque dans ma vie, c'est bien ça le problème. Je ne me mettais pas en situation de risque, je sortais jamais de ma zone de confort, je ne me confrontais pas aux éléments, je restais dans mon trou jusqu'à ce que mort s'en suive, à me nourrir d'aliments régressif comme une sorte d'embryon alimenté par un placenta géant qui flottait au dessus de moi tel un nuage de bouffe et maintenant ce placenta était resté de l'autre côté de l'Atlantique avec mes parents enterrés au cimetière. J'étais seul dans la galaxie dans une nature déchainée. Je rêvai de me téléporter dans le Delli de Williamstown, la serveuse m'aurait dit Honey qu'est-ce que je te sers aujourd'hui, saucisses grillées, bacon, long café allongé, pancakes, tu veux du sirop d'érable mon chou ? Mon chou oui, mon gros chou. Bon Dieu elles étaient passé où toutes ces filles sympathiques du Middle West ? est-ce qu'elles avaient simulé avec moi ? et Patricia pourquoi m'avait-elle épousé ? Moi le fils de fermier et elle qui venait de la ville. Pensait-elle que la connaissance de la langue française me donnait plus de distinction, de classe ? Il faut dire que je n'étais pas aussi gros à l'époque. Patricia ne m'aimait plus. Je ne l'aimais plus. J'étais parti et j'avais perdu tout le confort. D'ailleurs où allais-je habiter à présent ? Devrai-je payer une pension alimentaire ? L'orage s'éloigna. Il faisait sombre. Je ne trouverai certainement pas un hôtel sur cette route. J'ouvris la porte et allai pisser dans le champs devant moi. Je revins et mangeai les trois gâteaux restant au fond du paquet. Mon portable n'avait presque plus de batterie aussi décidai-je de ne pas appeler Agnès. Je m'assoupis comme je pu en inclinant le siège passager. Je vis à la lisière du champ une meute d'animaux passer. Une apparition. Etait-ce des bouquetins ? des sangliers, peut-être des biches ? Depuis combien de temps n'avais-je pas passé la nuit dehors ? Me revint l'épisode du camping avec mes parents. Les seules vacances que nous avions passé ensemble au bord du lac Michigan. Pas loin de la ferme.

Round 27/42 écrit le dimanche 5 avril 2015

316 mots | 1889 signes

J'avais rêvé de Michelle, mon premier amour. Où était-elle à présent ? rue Maubeuge ? Plusieurs fois dans la nuit je m'étais réveillé à cause du froid. Je ne portais qu'un sweet et l'air était frais en altitude. Vers deux heures je me décidai à démarrer. Je mis le chauffage à fond et la radio aussi. Des auditeurs posaient des questions intimes en direct. L' Amérique me manquait. Tout me semblait trop étriqué ici, les maisons, les routes, les clochers. Et cette twingo ridicule dans laquelle mes jambes avaient de la peine à s'étaler. J'atteignis un village mais tout était fermé. Aurais-je assez de carburant pour arriver aux Espêches ? Je rallumai mon portable et essayai de trouver une voie rapide mais ne vis rien dans les parages. Des ombres fantomatiques bordaient la route. Un peu réchauffé par la ventilation de la voiture, je décidai de m'arrêter jusqu'à ce que le soleil se lève et m'assoupis de nouveau. Je me garai avant un panneau qui indiquait col du ? route ouverte. Je rêvais de nouveau des femmes que j'avais connues avant Patricia, mon premier baiser à la high school, mes petites amies : Jennifer, Tracy, puis Ashley, le voyage en Europe, mon histoire avec Michelle, le retour et la rencontre avec Patricia. Nous avions fait un paris avec un copain d'université. Le premier qui arriverait à sortir avec Patricia. On l'avait invité tour à tour . Elle m'avait choisi parce que je ressemblais à un Irlandais avec mes cheveux roux. Ses ancêtres étant irlandais. Je faisais un master de littérature française et elle un bachelor de science. Ses parents m'avaient rapidement invité à passer le week-end dans leur chalet. J'avais pas trop de fric à l'époque. Puis Patricia arrêta ses études et commença à bosser. Elle voulait faire vétérinaire mais c'était trop dur alors elle s' orienta vers le toilettage des animaux.

Round 28/42 écrit le lundi 6 avril 2015

172 mots | 1103 signes

Agnès (USA)

Justine passa des heures scotchée devant l'écran de l'ordinateur d'Ethan à rechercher les possibles excursions à faire dans le coin. J'errai dans les grandes pièces de la maison sans rien trouver de personnel. Je n'avais pas l'impression qu'Ethan habitait ici . Tout me semblait trop propre, trop rangé.

Ethan m'avait souvent parlé du lac que nous apercevions par les fenêtres de sa maison côté sud. Je proposai à Justine d'en faire le tour. Je préparai un pique nique et nous prîmes nos maillots. En bas du jardin, il y avait un passage qui rejoignait le sentier qui menait au lac. Nous l'empruntâmes et arrivâmes à un ponton. Quelques pécheurs étaient assis au bord de l'eau. Je compris rapidement pourquoi je ne voyais aucun baigneur dans l'eau. L'endroit regorgeait de moustiques (?) Le voisin Nikos nous voyant revenir proposa à Justine de profiter de sa piscine (plus grande que celle des Cadwell). Il y avait quelque chose de très relaxant dans la relation avec les américains. Tout paraissait simple et assez superficiel. Parfait pour des vacances.

Round 29/42 écrit le mardi 7 avril 2015

296 mots | 1890 signes

Ethan

Lorsque j'arrivai aux Espêches dans la soirée, Un orchestre de bal musette jouait sur la place et des lampions étaient accrochés sur des fils tendus entre les maisons. Quelques couples dansaient et des jeunes allumaient des pétards. On était déjà le 13 juillet et je ne réussis pas à dormir à cause du bruit. Je traînais au lit pendant trois jours. Commençant de nouveaux romans. décidé à m'attaquer à l'étagère consacré aux auteurs français contemporains. J'étais fier des étagères que j'avais construites. Je discutai un peu avec Micheline, la mère d'Agnès. Je lui demandai si les livres venaient d'elle et son mari où si c'était Agnès qui les avait acheté. Elle me confia qu'elle avait récupéré le stock de la bibliothèque itinérante de la région. Elle avait été bénévole durant des années et lorsque qu'une médiathèque fut construite au bourg voisin, personne ne savait quoi faire de tout le fond. Elle décida de le racheter. Même si elle lisait peu. Je compris pourquoi tous les livres avaient des numéros. Moi qui pensais que c'était un classement incompréhensible et mystérieux d'Agnès.

Le soir je descendais au potager pour arroser. Un ruisseau serpentait en bas du champ. C'est là qu'il fallait puiser l'eau. Le jardinage était mon élément. Je me sentais en communion avec le monde végétal. Je pouvais parler aux légumes je savais qu'ils ne me feraient aucun mal. Les courgettes devenaient grosses. J'en cueilli une et préparai une soupe avec des oignons et un peu de fromage de chèvre râpé. Régulièrement je regardai les horaires de vol pour les Etats-Unis, puis les horaires de trains pour Paris. Je gardais la possibilité de rentrer à tout moment, éclaircir ma relation avec Patricia et celle avec Agnès. Mais je ne faisais rien. A chaque fois que j'appelai Agnès elle ne répondait pas.

Round 30/42 écrit le mercredi 8 avril 2015

318 mots | 2105 signes

Il ne s'était jamais rien passé d'extraordinaire dans ma vie. Au fond du jardin potager, une petite cabane en bois vermoulu. Pas du tout le genre de notre cabane de jardin avec les chaises, le parasol, les outils de jardin. Depuis que j'avais maigri, il m'était plus facile de m'accroupir et de bêcher. Je sortis un pliant de la cabane et m'assis. Contemplai le ruisseau puis otai mes chaussures et me trempai les pieds dans l'eau claire. La veille j'avais commencé un livre de Modiano. Je n'avais pas lu de littérature française depuis la fin de mes études. Le seul français que je pratiquai était issu du vocabulaire technique de l'electro-ménager. Ralentir. Ne plus avoir de contraintes. Ne plus être là pour personne. Personne. Personne. Personne. Inconnu, étranger, personne sans domicile fixe, abonné absent, gros puceron enfui de sa zone de confort. Absent Absent A B sent sans limite, hors limite, hors normatif, hors nommé. No place for me in this world. Je fermai les yeux, les pieds dans l'eau du ruisseau, assis sur une pierre, le chant des oiseaux tout autour. Partir Alors partir ? Vraiment partir ? Partir ? Aucune envie de rentrer à Lakeview Carole passa pour me donner des brochures touristiques. - C'était bien Marseille ? Je ne voulais pas lui raconter l'épisode avec la voiture d'Agnès. - Oui, j'ai poursuivi jusqu'en Italie. Je lui racontai mes périples sans trop donner de détails car je la soupçonnais de raconter à Agnès nos échanges. Le soir, je remangeai des courgettes, des tomates et des pêches. Serais-je capable d'aimer une autre femme, serais-je capable d'aimer Agnès ? de la rendre heureuse ? d'être heureuse avec elle ? Trop de questions se bousculaient dans ma tête. Ne devrais-je pas acheter une maisonnette à l'écart du bruit du monde ? Il fallait que mon questionnement cesse. J'avais des nouvelles de mes fils à chaque fin de semaine mais ce n'était que des échanges superficiel. Superficelle comme de la ficelle. Fils-elle. Elle fit, fit-elle ? fuit-elle ? me fuit-elle ? pourquoi me fuirait-elle ?

Round 31/42 écrit le jeudi 9 avril 2015

273 mots | 1595 signes

Au soleil, les pieds dans l'eau de la rivière, les heures se délitaient. Mon coeur dans le tambour d'une machine position pré-lavage. Mes pensées détrempées, le corps essoré. Lorsque la canicule survint, je me réfugiai au rez-de chaussée. La pièce de débarras où j'avais trouvé les outils pour fabriquer les étagères. Pas d'ouvertures dans les murs. Une sorte de cave bien fraiche. Au fond sous l'escalier se trouvaient quelques bouteilles poussiéreuses. L'endroit était colonisé par les araignées. Je trouvai une collection d'un magazine des années 1980. L'année de mes 18 ans. Il était question de caissons d'isolation sensorielle, de Klaus Nomi, de marguerite Duras, de voyages et de quêtes. Qui pouvait bien lire cela ? Agnès ? Micheline ? Je me mis à regarder les brochures touristiques que m'avait donné Carole. Un dépliant attira mon attention : école de parapente du col des Limouches. Au dos du prospectus se trouvait un encadré : "spécial baptême - réduction pour les seniors". Sur une photo le moniteur avait l'air d'un type franc, pas compliqué. Le lendemain je montai en voiture jusqu'au col des Limouches. Il n'y avait ni parapentes, ni moniteur. Je pris une photo du panneau "D68 col des Limouches altitude : 1086 mètres" et l'envoyai à Agnès avec le message : Tu connais cet endroit ? Bizarrement elle me répondit aussitôt : Il y a eut un accident. Un homme est mort, il devait avoir ton âge tiens. Tu ne vas quand même pas faire du parapente ? Si ? Je pensai si je ne peux pas faire du paramour, je tenterai bien le parapente.

Round 32/42 écrit le vendredi 10 avril 2015

416 mots | 2332 signes

Chère Agnès, J'ai perdu du poids ( involontairement). Tu as comblé un manque ou ouvert une brèche. L'air qu'il y a dans ta maison, les livres que tu as feuilleté, les draps dans lesquels tu as dormi, les pulls qui t'ont réchauffé. Tout me parle de toi. Ce matin je suis allé à la poste et je t'ai envoyé un colis. Comme si nous étions passé à autre chose. Je n'ai plus envie de texto ni d'ordi ni de vidéo. Je voudrais revenir au temps de la correspondance. Je te joins un recueil de lettres de Joë Bousquet car j'ai vu que tu n'en avais pas dans ta bibliothèque, des brins de lavande et un pot de la confiture d'abricot que j'ai réussi à faire . Je suis descendu à Montélimar, j'ai pris du nougat pour Justine, tu lui donneras de ma part. Tu manques à mon âme. Nous sommes à mi-chemin de notre échange. Que comptons-nous faire ? Souhaites-tu que je revienne plus tôt ou bien que je t'accueille ici ou bien que je disparaisse de ta vie en laissant des traces ? Je me pose la question Chère Agnès, chère(s) ange(s). J'ai contacté le monsieur du Col des Limouches et il m'a dit que je pourrais monter dans le parapente, j'étais juste en dessous de la limite de poids. Tu penses si je suis content. Nous avons pris rendez-vous vendredi prochain. D'ici là je fais attention à ne pas reprendre quelques grammes. Ce n'est pas le moniteur qui était sur la photo mais son associé qui s'occupe d'un élevage de lamas. Il s'appelle Michel. Bon je te liasse, je te laisse, je te "s" est-ce cela ? j'ai du mal à raccrocher des mots. Ta maison n'est pas faite pour les nouvelles technologies, c'est un havre, un refuge, un passage vers les temps anciens. Il faut la garder ainsi, changer peu de choses, à moi elle me convient bien. Si je ne te vois pas d'ici là, j'espère que tu ne m'en voudras pas d'avoir fait quelques modifications qui vont dans le sens du confort. Avant de te rencontrer, avant de t'écrire, avant de te parler, je ne savais pas qu'il était possible d'aimer d'une façon aussi légère. Tu as réveillé mon âme, tu as soufflé dessus et tu l'as arrosé, nourrie par ton humour et ta gentillesse. Agnesse, (il te faudrait plus d"s" et plus d"a" comme la sagesse) je vais m'acheter des baskets pour pouvoir descendre la pente herbeuse qui part du col avant de m'envoler. Ethan

Round 33/42 écrit le lundi 13 avril 2015

273 mots | 1544 signes

Agnès - Lakeview

La maison de Lakeview me convient. Je n'ai ni trop chaud ni trop froid. Tout est organisé, confortable. Ce n'est pas vraiment joli mais ça me libère l'esprit. Je ne supportais plus de vivre dans les meubles de mes parents, les vieux buffets, les livres, cet encombrement. Justine a fait tomber mon portable dans la piscine. Elle l'utilisait pour jouer car le sien ne captait rien de l'autre côté de l'Atlantique, elle jouait dessus et il lui a glissé des mains. Je ne l'ai même pas grondé. Tant pis. Si Ethan a besoin de me joindre il appellera sur le fixe. Nikos a sonné pour m'apporter un colis que le facteur lui avait déposé lorsque nous étions absentes. ça m'a rappelé lorsque je partais en colonie de vacances et que ma marraine m'envoyait un carton avec des bonbons, des gâteaux, un petit mot. A l'intérieur il y avait un livre et des mots doux d'Ethan. ça peut paraître assez suranné de recevoir un colis.

Nous sommes en tête à tête avec Justine. C'est les premières vacances que nous passons toutes les deux. Ma fille est assez agréable. Elle a sympathisé avec des jeunes du coin. Et s'est fait inviter. Elle n'a pas envie de repartir en France. Elle trouve que les gens sont plus ouverts ici. Mais il y a un garçon dans le groupe qui est étrange. J'espère que ses parents n'ont pas une arme chez eux. Il faudrait que je regarde la loi sur le port d'arme dans l'état du Massachusetts. Quand je pense aux tueries qu'il y a eu dans plusieurs établissements ça me fait peur.

Round 34/42 écrit le mardi 14 avril 2015

327 mots | 1757 signes

Agnès - Lakeview

Le gars s'appelle Evans. Il a un petit défaut sur son visage, sa paupière tombe un peu sur l'oeil et ça donne un aspect étrange à son regard. Il est en vacances chez ses grands-parents dans la ferme un peu plus bas. J'avais vu son grand-père sur un tracteur en allant me balader. Il est tout seul il s'ennuie et il vient jouer à des jeux vidéos avec le fils de Nikos qui s'appelle Justin. Justin et Justine c'est drôle. Justin a une petite amie qui se nomme Blake. Ces jeunes sont un peu plus âgés que Justine, c'est ça qui m'embête. Qu'est-ce que j'ai à avoir peur de tout pour ma fille ? Je voudrais la mettre en garde mais j'ai l'impression que c'est trop tard, elle se rebellerai. Me dirait : Eh c'est bon, tu crois que je ne sais pas déjà tout ça. Aujourd'hui ils doivent prendre le bus tous les quatre pour aller jusqu'à Bennington, faire un tour en ville et manger des glaces. Puis le soir Susan la femme de Nikos viendra les chercher. Est-ce que je ne devrais pas sortir et aller manger une glace moi aussi, rencontrer un bel américain, nager, courir, dompter ma peur ? Mais non je vais rester ici en attendant le retour de ma fille et prier pour qu'il ne lui arrive rien. Je ne pense plus à Ethan en ce moment. Je pense à où va ma vie ? comment sortir de la maison prison de mes parents ? comment retrouver l'élan vers quelque chose de nouveau ? Un drôle de type est passé dans l'après-midi; Il devait donner à Ethan une enveloppe avec de l'argent. Il s'appelle Bikkie. Nikos et Susan m'ont invité à un barbecue dimanche. Il y aura quelques amis à eux. J'ai dit que j'amènerai une quiche. c'est bizarre de rentrer dans la vie d'un couple comme ça. S'ils savaient que moi et Ethan ... bref

Round 35/42 écrit le mercredi 15 avril 2015

411 mots | 2462 signes

Ethan

Depuis que j'étais en France, loin de Patricia, je n'avais plus cette sorte de barre à l'estomac et ce noeud au plexus. Je pouvais étendre mes bras et élargir ma conscience. Je fis des courses pour la mère d'Agnès et elle m'invita à boire un café. Je pensai : si je n'arrive pas à joindre Agnès au moins je garde le contact avec sa mère, je trace des ramifications. Micheline me raconta son boulot d'avant. J'aimais bien sa franchise, son côté rentre dedans qui devait venir de ses origines du Sud. - C'est quand même pas le coca et les hamburgers qui vous ont fait gonfler comme ça ? - J'ai assez bouffé pour ne pas me faire dévorer. Ma femme est un serpent ou une araignée, je devais être sur mes gardes. - Vous savez dans mon métier, j'ai eu l'occasion de rencontrer des gens comme vous, des gentils qui ne se sont jamais rebellés. Je soupirai. - Vous connaissiez l'ancien mari d'Agnès ? Micheline hocha la tête. - Pourquoi se sont-ils séparés ? - Agnès n'était pas heureuse. Elle voulait se persuader que oui mais elle a dépéri, elle ne voulait rien entendre. Elle s'est éteinte petit à petit. Micheline regardait ses mains en me disant cela. - Je ne sais pas comment elle a fait pour rester aussi longtemps avec Richard. C'est le contraire de vous, à chaque fois que je la voyais revenir aux vacances elle était amaigrie, transparente, n'ayant plus aucune force ni désir. Elle semblait vampirisée. Je regardai dehors. Des potées de fleurs ornaient les fenêtres et plus loin on apercevait une place ombragée. - Et votre mari, qu'est ce qu'il faisait ? - Il était représentant, pas souvent à la maison. - Vous vous entendiez bien ? - André n'a pas aimé qu'on déménage. On habitait un pavillon à la périphérie de Valence mais quand mes parents sont morts on est revenus vivre au village. Je n'aurais pas du. Je ne savais pas quoi faire de toutes les affaires de mes parents et ma soeur était fâchée, ne voulait plus les voir. Micheline soupira puis repris : - Elle n'est même pas venu à l'enterrement d'André. - Vous n'avez pas eu d'autres enfants ? - Si De nouveau elle regarda ses mains. - J'ai perdu un garçon à la naissance. J'ai eu tord de ne pas en avoir parlé à Agnès mais à l'époque ça ne se faisait pas. Je lui ai seulement dit à la mort de mon mari. Je pensai combien d'histoires cachées, de noeuds dans chaque famille, de souffrances et de non-dits.

Round 36/42 écrit le jeudi 16 avril 2015

271 mots | 1568 signes

Ethan

Micheline commença à m'appeler un peu trop souvent.

Un soir je montai au grenier. J'ouvris des cartons à la recherche d'autres livres que ceux qui étaient sur les étagères. J'eu l'impression de remplacer ma boulimie de nourriture par celle des livres. Je devins un lecteur compulsif. J'ouvris un carton contenant des lettres et je me mis à les lire en sachant que ce n'était pas correct. ça venait de divers membres de la famille d'Agnès. Plusieurs lettres étaient écrite par un homme du nom de Maurice. Je me demandai si ce n'était pas le père du premier enfant de Micheline. Je ne vis pas le temps passer. Vers minuit, je sortis dans la rue. Il n'y avait plus de lumière au fenêtre d'en face.

Manies d'Agnès confuse Je m'arrachai la peau sous les talons et il fallait toujours que j'aille au bout des tubes de dentifrice. Je ne me résolus pas à les jeter avant qu'il ne reste une seule goutte.

Justine se foula la cheville au bord du lac. Ils avaient fait les idiots avec sa bande de copains, courus dans les cailloux et elle trébucha, se prit le pieds dans une corde. Un des gars la porta jusqu'à la maison. J'étais dans le jardin. Je vis son pied en sang. Je paniquai. Nikos nous conduisit à l'hôpital le plus proche à ??? Là avant même de s'occuper de Justine ils me demandèrent ma carte bancaire. - Pourquoi ? - Vous n'avez pas pris d'assurance ? - Non, j'ai la sécurité sociale. - Il n'y aura pas de prise en charge chez nous. ça risque de vous coûter cher Je fulminai. Justine geignait de douleur

Round 37/42 écrit le vendredi 17 avril 2015

392 mots | 2306 signes

Agnès Idées de péripéties pour Justine

Suite séquence Hôpital- L' Hôpital le plus proche était à un quart d' heure de route à North Adams. Lorsqu'on arriva là-bas l'hôpital était malheureusement fermé. Nikos dit qu'il était désolé, il n'était pas au courant. Il y avait des panneaux sur les fenêtres et les portes. "Hôpital fermé - nous manquons de moyens - Que fait le comté ?" Nous repassâmes par Williamstown puis filâmes sur Albany. Justine geignait toujours dans la voiture. A Albany, la fille de l'accueil pris ma carte bleue et me fit remplir des papiers. Il fallut attendre un moment dans une salle d'accueil déprimante. Puis un médecin vint chercher Justine. Il l'examina puis l'emmena à la radiologie. Je calculai dans ma tête à combien allait revenir tous ces actes. A la radio le médecin constata que l'os ?? était fracturé. Il fallait plâtrer puis revenir pour un contrôle. Je dis qu'on avait pas le choix. A l'accueil, l'hôtesse me tendit une facture de ?? $ correspondant à la visite du médecin, la radio, le plâtrage et la location d'une paire de béquille. Justine souriais comme si elle avait attendu ce moment depuis longtemps. C'était la première fois qu'elle avait un plâtre. Elle aurait quelque chose à raconter aux copines. Nikos nous raccompagna à la maison.

Justin organisa une soirée et invita Justine. Elle revint tard dans la nuit. Ils avaient bu de la bière et elle avait tout vomi sur le canapé des voisins.

Lors de notre escapade à New York Justine piqua un truc dans un magasin. Un vigile l'a pris en flagrant délit. Je devais la retrouver. Lorsque je revins dans le magasin elle n'y était plus. J'attendis un moment puis je la vis me faire des signes. Elle était sur un siège au fond du magasin. Un vigile était à ses côtés. Il me dit que Justine avait mis un collier fantaisie dans son sac. Je ne comprenais pas c'était la première fois que ça arrivait. Le responsable vint et dit c'est bon pour cette fois mais il ne faudra pas recommencer.

J'eu peur que son père ne lui ai transmis ses gênes de schizophrène. Est-ce que ces maladies là ne se déclaraient pas à l'adolescence ? Ma fille border line. Ma fille chérie que lui avais-je fait ? Dans quel état reviendrait-elle en France ?

Round 38/42 écrit le samedi 18 avril 2015

311 mots | 1786 signes

Agnès et Justine :

  • J'en ai marre de ce plâtre, j'arrive pas à me laver, MAMAN passe moi un sac plastique je suis dans la douche, j'ai mis de l'eau sur mon plâtre, fais chier. J'entendais ces injures de l'autre côté de la porte de la salle de bain mais faisait semblant de ne pas être là. Vautrée sur le lit d'Ethan et Patricia. J'aurais voulu mettre des boules quies tellement Justine me cassait les oreilles.
  • MAMAN
  • qu'est ce qui se passe encore ?
  • PLASTIQUE STE PLAIT Je filai à la cuisine à la recherche d'un sac mais tous les sacs de courses étaient en papier kraft ici. Je finis par trouver un emballage de bouteilles de soda et un rouleau de scotch. J'enroulai le tout autour du pied de ma fille. Plus de baignade au lac, plus de visites, plus de vélo, qu'allait-elle faire ? à part geindre.. ah oui l'ordi j'oubliais, ça devait y aller sur les réseaux sociaux, genre je me suis cassé la cheville, la plaie, le voisin est mignon, lol, ma pauvre, tu dois t'ennuyer, lol
  • MAMAN, serviette En plus j'étais obligé de la materner. Nikos me conseilla de regarder les conditions d'assurance pour voir si je ne pouvais pas avancer mon retour.
  • Justine tu veux qu'on rentre plus tôt ? Non ce n'était pas à moi de lui demander, je devais prendre la décision toute seule. Ma fille sortit enfin de la salle de bain, les cheveux mouillés. Pas question d'avoir les cheveux gras, donc c'était shampoing obligatoires tous les trois jours.
  • MAMAN mes béquilles je les trouve pas
  • où tu vas comme ça ?
  • Vais voir Susan. Je dois l'aider à faire une vidéo de son chat. Elle est trop marrante, tu sais qu'elle a tout une garde robe pour Scarby.
  • Ah vraiment ? Je tendis les béquilles à Justine puis partis faire le tour du lac à pieds.

Round 39/42 écrit le dimanche 19 avril 2015

286 mots | 1535 signes

Journal de Justine (l'action se situe vers le début du Roman) Cher journal euh plutôt cher Kitty ou non chère Kate ou non chère Juju ou non chère Titine... je trouve pas de nom qui m'inspire, chère amie imaginaire que je ne connais pas et qui va bien vouloir écouter tout ce que j'ai à lui dire dans ma vie de poupouf, poufpouf, chère poufette chère grosse pouffette, bon j'arrête parce que je vais y passer des heures et que ma mère (comment je vais l'appeler celle là ? faut que je lui donne un nom de code, ma reum ça fait trop banlieue, ma génitrice, genre, ma génisse, mdr, mes gênes peut-être, ma MGM (mère génitrice metteuse au monde) MGT (mère gentille et un peu tarée) Méridien de Greenwich ? il me faudrait un nom de mère qui vient d'une série américaine genre Sue mais ma mère ne sue pas donc dans PLL ou alors Lois la mère de Malcolm mais ma mère n'est pas du tout hystérique donc la mère des Simpsons Marge ou bien Barge ça irait peut-être sauf que ma mère n'a pas les cheveux aussi volumineux. Je crois que je vais prendre une abréviation qui la définit dans les adjectifs : chiante, gentille, tarée ah ah CGT ou FO force de l'ovule aha ahha. Je crois que je vais pas réussir là. Bon je vais garder MGT ou bien frigo parce que taré c'est plutôt réservé à mon paternel ou bien Gnangnan. Donc père très taré = PTT ou PF pour père fou et du coup ma père va s'appeler Mère Gentille et Chiante, MGC ou MCG avec tout ça je n'ai pas commencé mon journal. La suite demain ;)

Round 40/42 écrit le lundi 20 avril 2015

593 mots | 3296 signes

Cher inconnu X secret, Cher journal dlaballe, Cher xy, Bon allez stop, j'arrête. Donc venons en au fait. Hier j'ai ouvert la boîte mail de ma mère comme tous les soirs quand je rentre du collège. (Ah comment je vais l'appeler le collège ?). Donc j'ai ouvert la messagerie de MGmI (mère gentille mais incapable) ou MGeD (mère gentille et débile .. rapport aux nouvelle technologie.. non mieux Mère de l'ancien temps ou mère des temps anciens ou internet n'existait pas lol lol lol ). Eh bien figures toi chère journal XXYY que dans la messagerie il y avait un mail en anglais.. qui n'était pas de la pub ni un spam. J'ai ouvert le mail lol ça va brûler je me suis dit, putain, Justine tu fais encore un truc de ouf. J'ai pas trop capté le texte mais il y avait un lien vers une vidéo en anglais. Evidemment j'ai cliqué dessus - genre Justine la meuf qui clique plus vite que son ombre - ça m'a ouvert ioutube. Et là devines ? c'était une démonstration de robots culinaires.. Et je rêve ? ma Mère de l'ancien temps veut s'acheter un appareil électroménager genre. J'adorerais avoir un blender pour faire des smoothies au goûter avec des tonnes de framboises surgelées, genre, ça serait trop classe bon faut pas rêver. La démonstration était évidemment en anglais non sous-titrée. J'ai mis les sous-titres de ioutube mais c'était grave débile donc j'ai rerererecliqué sur le truc. La fille qui présentait les produits était assez canon j'ai trouvé. Genre le contraire de votre serviteur. Blonde alors que je suis brune. Grande alors que je suis petite, mince alors que je suis mince lol pétée de rire je suis. Bon elle avait pas de boutons mais ça c'est facile à faire disparaitre avec le fond de teint + la BB crème + la poudre libre (les trucs que je voudrais m'acheter mais que je n'ai pas encore, faut que revois les vidéos d'enjoymapomme pour valider mes choix) bref je m'égare, je m'égare comme d'hab. La fille, la présentatrice avait un décolleté grave genre vous avez vu que j'ai des seins, que je suis une fille, que je présente des appareils ménagers mais que je sais que vous en avez rien à foutre, ce qui vous intéresse c'est les deux boules qui se balancent au milieu de l'écran quand je me penche pour mettre des bananes dans la cuve du robot. Le contraire de moi donc qui n'ai quasi pas de sein, la fille plate quoi, la fille qui a quatorze ans elle s'est pas encore mise dans le programme puberté, lol lol, fais chier, les oufs de ma classe me demandent si je n'ai pas sauté deux classes genre je viens direct du CM2 alors que je suis en troisième, vivement le lycée que je quitte ce bahut de la mort parce que direct je pars en internat ou bien je vais habiter avec mon paterfou à côté de Paris et aller dans the lycée classe du xx arrondissement. J'ai toujours pas compris pourquoi ma mère de l'ancien temps recevais ce genre de vidéo mais je vais mener mon enquête et puis faire du lobiiiing genre maman ça serait chouette si on avait un blender, Emma ma copine, tu sais celle qui habite rue des acacias, ses parents ont acheté un blender ils disent que c'est grave mieux pour les vitamines et que même depuis sa moyenne de math a carrément augmenté. Ah ah je vois d'ici la tronche de ma M des temps anciens.

Round 41/42 écrit le mardi 21 avril 2015

345 mots | 1879 signes

Cher xy, j'ai enfin compris l'histoire du mail de ma mère. C'est un américain qui s'est planté grave. Il voulait lui proposer un échange de maison et il a envoyé des vidéos de cuisine. Le gars doit être un peu taré quand même. Bref, je suis quand même méga-excité pake ça veut dire que ma mère envisage de partir aux States. Non mais j'y crois pas en fait. Ma mère prendre l'avion ? Je rêve. ..quand je vais dire ça aux lourdaus de la troisième D ils vont grave halluciner. Genre la meuf elle part à NY. J'ose pas dire à ma mère des temps anciens comment je suis allumée avec cette histoire. Je fais genre Ah bon ? On va peut-être faire un échange de maison ? Ouais pourquoi pas et où ? Ouais sympa. Et à l'intérieur y'a juste mon coeur qui bat à fond comme quand je cours le 800 mètres en EPS. J'aimerais bien partager cette nouvelle avec mes copines mais j'ai peur que ça fasse le tour des réseaux sociaux et si ça foire bonjour ma réputation. Today la prof de techno a grave pété son cable parce qu'on faisait soit disant le chahut en cours. Isabeau qui est vraiment pas la fille recommandable mais que j'aime bien, a proposé qu'on fasse grève parce que la prof avait insulté des gens de la classe mais personne n'a suivit. Du coup à la récrée on s'est mis d'accord à trois pour sécher les cours de l'aprèm. J'avais trop les nerfs avec la prof. Direct après la cantine on a filé chez Momo au café d'en face. J'ai dit à la pionne que j'allais récupérer un truc chez Laure et on est pas réaapparu. Ma mère m'a passé un savon mais un savon mou genre sans aucune autorité et pas convaincu. The problème c'est qu'elle a rendez-vous avec la principale demain pour parler de ça. Les boules. En attendant je vais faire ma gentille. J'ai mis la table, rangé mes affaires sales dans ma chambre et pas squatté l'ordi du salon.

Round 42/42 écrit le vendredi 24 avril 2015

479 mots | 2586 signes

Journal de Just'in Ah ah c'est mon nouveau surnom. c'est juste moi qui écris ça. La classe, Non mais la classe j'te dis.. ouais Just In c'est juste parfait. La fille qui est juste classe quoi. Donc moi Justin 14 ans je m'embarque pour les States dans une semaine. The problème c'est que ma mother est tombé grave amoureuse du gars chez qui on va. Elle pense que je n'ai rien remarqué. Mais je suis pas conne depuis qu'il est là, elle arrête pas de me demander d'aller dormir chez mémé ou chez mes copines sous prétexte que bah c'est bientôt les vacances, je devrais me détendre, etc... Donc pendant que je crèche ailleurs il y a ce gros Ethan qui vient mettre ses grosses pattes dans mon monde. Putain je dis pas que ce mec n'est pas drôle et sympa mais tu ne peux pas ne pas le remarquer quoi, on dirait hulk en blanc et sans les muscles. Bref, j'imagine même pas qu'il devienne mon beau-père. Je vais tout faire pour empêcher ça, c'est sur. Donc je vais avoir besoin de 1) stratégie 2) ténacité 3) hargne. y'a peut-être autre chose mais je vais réfléchir en chemin. En tout cas sur les photos, sa maison avait l'air très classe. Donc on va voir ce que ça donne sur place. J'ai une seconde idée qui ne va pas plaire à ma mère des temps anciens c'est que j'ai vu sur des blogs que les fringues aux States c'était pas cher donc je vais faire semblant d'avoir oublié mes affaires dans ma valise ou bien je ne vais prendre que des trucs pourris. J'en sais rien en fait. Imagine qu'on aille même pas dans les magasins, qu'on soit dans un bled paumé et qu'il y ait le sosie de Robert Pattinson dans les parages et que je n'ai rien à me mettre. Les boules. Les filles de ma classe sont trop jalouses. Elles me demandent toutes de leur ramener des trucs non mais impossible avec l'argent de poche que j'ai. Faudrait que je demande à mémé Micheline de me filer des tunes. J'suis sure qu'elle serait d'accord Mémine. Bon faut que j'aille me pieuter je passe le brevet demain. Ma mère stresse mais moi je m'en ouf parce que je passe en seconde, je vais à l'internat l'an prochain à moins que je reste aux States.. genre le mec épouse ma mère et on devient américain et je vais à la fac là bas. Non mais genre the life quoi. Trop marre de la province. Je suis inscrite au lycée de Valence mais je ne sais pas si j'irais. Deux solutions : Je squatte chez mon père, on reste aux States, je reste ici. Bon la meuf qu'arrête pas de se poser des questions quoi. Signé Just'In Bleaux eh j'ai les mêmes initiales que Justin Bieber trop la honte...