[MOOC] [CDL] par CDL

Campagne commencée le lundi 16 janvier 2017

Rounds Mots Signes Temps
3/30 1447 8996 00:00:49

Round 1/30 écrit le lundi 16 janvier 2017

728 mots | 4328 signes | 00:00:49

4 couleurs

Il me tripote et ne cesse de me faire tournoyer. Jamais bien haut : il ne voudrait pas attirer l’attention sur lui. Il risquerait de transpirer abondamment et de me manipuler avec bien peu d’adresse. J’ai l’audace de penser que je suis, pour lui, un moyen de s’évader, de s’amuser et aussi le seul outil qu’il utilisera au cours de son existence pour faire preuve de désobéissance. Notez néanmoins qu’il ne me respecte pas à ma juste valeur. Il passe son temps à m’enfoncer dans toutes les surfaces à portée de main : la table du dernier rang, toujours à droite, ses carnets inachevés, son bras graisseux, les cahiers de brouillon de ses voisins de table. Pour les autres, c’est-à-dire les êtres humains qu’il côtoie, il est bien commode, malléable. Une bonne pâte pas bien dangereuse qui rasera les murs pendant toute la durée de sa scolarité. Pour moi, c’est-à-dire un modeste stylo 4 couleurs, il est un maître à la fois cruel et exigeant. Il me tord, me mâchouille, m’épuise et me livre, dans mon encre, ses pensées intimes que j’aimerais ignorer.

Je ne suis pas le seul à entrevoir ses états d’âme. Il y a bien son habituel voisin de table, le bon Basile. Contrairement à mon porteur, c’est un garçon dynamique, souriant et attachant. Il prend soin de ses stylos et il est même étonnamment délicat avec sa plume. Je sais que Basile est répugné par le manque de soin criant de mon porteur envers mes congénères de trousse, mais il a la gentillesse de se taire. Il respecte mon porteur et éprouve certainement quelques sentiments positifs à son égard. Un début timide d’amitié ou une politesse exacerbée. Difficile à dire, pour un stylo. Basile lui prête ses cours, l’aide à se maintenir éveillé en classe et partage même quelques blagues bien senties que je pourrais apprécier si j’avais un quelconque sens de l’humour. J’ai longtemps envié la trousse de Basile mais je me suis fait une raison : chaque humain a une croix à porter, chaque stylo a un humain à supporter.

L’heure de littérature donnée par madame Renard est souvent l’occasion de partager des ragots, des jeux ou des soupirs. Il y a du temps à tuer et les stylos sont les armes les plus efficaces pour percer ces bulles d’ennui qui accompagnent chaque élève tout au long de son apprentissage. L’initiative vient de Basile, comme souvent, il arrache discrètement une feuille de brouillon et gribouille avec majesté les prémices d’un jeu qui traverse les âges : le pendu. La rangée de tirets est en place et la consigne donnée par Basile est on ne peut plus claire : « Je suis amoureux d’une fille, trouve son prénom ». La main habituellement molle de mon porteur s’agite, il me laisse tomber et, déjà, je sais que quelque chose cloche. Il finit néanmoins par me ramasser, en se cognant maladroitement au passage sur un coin de table. Les chuchotements se multiplient, les lettres s’égrènent et le pendu commence à prendre forme. Le tracé de Basile est beau : son écriture est fluide, il sait tenir son stylo et il possède la détermination de celui qui a une idée en tête et qui est bien décidé à aller jusqu’au bout. Trois lettres sont révélées, le O, le M et le É. Les trois tirets restants ne sont plus un mystère, mon porteur propose à Basile le prénom SALOMÉ. Le silence s’installe, avec lourdeur, puis Basile confirme : il est bien amoureux de Salomé et il s’en excuse.

Avant d’être condamné au rebut, je peux vous assurer que j’ai vécu de nombreuses choses. Même un porteur tel que le mien se confronte à la vie, bon gré mal gré. Le stress d’un examen important, le spleen d’un journal intime, l’espoir d’un petit mot qu’on partage avec une camarade de classe ou bien encore la candeur d’un dessin gribouillé sur une nappe. Mais, de mémoire de stylo, cette partie de pendu est le souvenir le plus palpable se trouvant dans ma cartouche. Par la suite, mon porteur a été fidèle à lui-même : mou, inexpressif et fuyant. Mais quelque chose de léger, à peine vivant, a traversé sa carcasse fêlée. Il ne l’écrira jamais et n’en parlera à personne, pas même à Basile. Mais moi, je le sais, je le devine : lui aussi il l’aimait, sa Salomé.

Round 2/30 écrit le samedi 21 janvier 2017

238 mots | 1456 signes | 00:00:49

Métro, boulot, lexo

Mélaïcha est pigiste chez Vice et on vient enfin de lui confier une tâche honorable : elle a trente jours pour rédiger un article sur le métro parisien. Bien décidée à écrire le papier le plus abouti de sa jeune carrière, elle quitte son quotidien de parisienne sans-le-sou, mais néanmoins branchée, pour se confronter à des personnes qui risqueraient de faire vaciller sa vie : l'anarchiste à vélo, le chanteur de la station Opéra, le chauve sur son solowheel ou bien encore les toxicos de la plume. Son reportage se transforme rapidement en enquête criminelle : qui a tué l'homme qui montait toujours en premier dans la rame ?

Mon roman va reposer sur une galerie de personnages et sur un ton volontairement absurde. J'aimerais aussi pouvoir explorer plusieurs genres particuliers : passer du récit absurde au roman policier et finir par du fantastique et/ou de la SF. Je sais que la tâche n'est pas aisée et que le résultat risque d'être perfectible, mais je tiens à cette contrainte de mélange des genres (que j'apprécie au cinéma, que j'aimerais transposer sur papier). Je sais où je veux aller en termes de narration, je vais écrire à la première personne, j'ai beaucoup (trop) de personnages mais c'est bel et bien le métro parisien qui m'obsède et que je souhaite engluer dans mon histoire.

Si quelqu'un souhaite faire, plus tard, la bêta-lecture de mon histoire, n'hésitez pas :)

Round 3/30 écrit le samedi 28 janvier 2017

481 mots | 3212 signes | 00:00:49

Métro, boulot, lexo

Inspirations du roman : Zazie dans le métro de Queneau, Vurt de Jeff Noon, le cinéma sud-coréen, la chanson The Riddle de Nik Kershaw, le film Subway de Besson.

Objectif en termes de narration : réussir le mélange des genres (récit absurde puis policier puis fantastique puis SF).

Mélaïcha, l’héroïne de l’histoire, est aussi la narratrice.

L’enjeu externe change plusieurs fois de forme : Mélaïcha se concentre d’abord sur l’article qu’elle doit terminer en trente jours puis c’est l’enquête qui prend le pas sur le reste.

L’enjeu interne est aussi multiple : mettre des mots sur sa sexualité et ses sentiments, changer radicalement de point de vue par rapport à son environnement urbain (Paris et son métro), déterminer les limites qui existent entre le réel et l’onirique (le ton absurde de l’histoire crée un doute dans son esprit).

Début :

Mélaïcha, trente-deux ans, pigiste chez Vice. Petit flocon de neige pour ses parents, ego tourneboulé pour son entourage amical et professionnel. Sexuellement désorientée, sentimentalement hésitante, ne mange ni viande ni poisson et aime à penser que l’immense pièce de 10 m◊ qu’elle loue à Paris est un avantage considérable.

Une tâche honorable lui tombe enfin dessus : elle a trente jours pour rédiger un article sur le métro parisien. Elle se fait violence et s’immerge dans les dédales d’un monde qui n’est, pour elle, que fantasmes et idées reçues. Mélaïcha, pleine de bonne volonté, rencontre des personnes qui vont la faire vaciller légèrement : Jacky le chanteur de métro fan de Daniel Balavoine et Amouna, une « imprécatrice-amuseuse professionnelle ».

Son travail journalistique bascule le jour où elle assiste à la disparition d’un homme de petite taille, chauve et bedonnant, qui avait une seule et unique obsession : monter le premier dans une rame de métro afin de trouver la faille temporelle lui permettant de rejoindre son époque.

Milieu :

Mélaïcha ne s’attarde pas de suite sur la disparition et les lubies d’un homme qui n’est qu’un hurluberlu de plus dans son quotidien. Toujours est-il qu’elle se laisse embarquer dans une enquête, emportée par l’énergie débordante d’Amouna et les bizarreries touchantes de Jacky.

L’article sur le métro passe au second plan, il s’agit de retrouver la piste du gros bonhomme qui prétendait pouvoir voyager dans le temps. Mélaïcha quitte peu à peu son quotidien, obnubilée par Amouna qui l’invite à ne jamais se retourner quoi qu’il arrive.

Les événements se multiplient et Mélaïcha s’évertue à garder un pied dans le réel, mais rien n’est là pour l’aider : elle enquête dans les stations désaffectées du métro parisien (Porte des Lilas-Cinéma et Arsenal), elle se fait traquer par une branche secrète de la RATP et s’initie à une drogue qui ne la laisse pas indemne (la plume).

Fin :

Je garde pour moi les développements de la dernière partie du roman, j’envisage de le faire basculer dans la SF et de donner une explication cohérente aux intrigues absurdes.